De manière très schématique, on peut classer les différentes méthodes de travail en commun en trois grandes catégories :
Mutualiser des ressources pédagogiques, c'est les mettre en commun. C'est le niveau le plus basique du « travailler ensemble » dans la mesure où le côté collectif n'intervient généralement qu'en bout de chaîne, au moment de rassembler les ressources dans un catalogue pour les mettre à disposition, par exemple sur un site Internet. Tout l'intérêt consiste, pour l'utilisateur, à avoir un seul point d'entrée pour toute une série de ressources qui partagent des caractéristiques communes (par exemple, pour les REL : la discipline enseignée ou le niveau d'enseignement...). Dans certains cas, les banques de ressources permettent de les indexer et donc de les retrouver plus facilement en faisant une recherche thématique ou par mots-clés. En général, les REL ainsi mutualisées répondent à des cahiers des charges minimalistes : la licence, le format, le contenu... parfois il y a un filtre à l'entrée (par exemple pour juger de la qualité d'une ressource), parfois le filtre c'est l'utilisateur lui-même. Ces banques de ressources mutualisées présentent souvent des redondances ou des trous, dans la mesure où l'accroissement des ressources se fait généralement de manière désordonnée : si chacun apporte ce qu'il a, forcément on retrouve des doublons, des incohérences entre approches... Il est, a priori, difficile d'envisager la création d'un manuel scolaire uniquement sur un mode mutualiste, dans la mesure où il est très difficile de préserver l'unité pédagogique de l'ouvrage dans un tel contexte. Par contre, c'est souvent le principe de mutualisation qui s'applique pour les grandes banques d'images REL, qui seront autant de petites briques utilisables dans le manuel. Dans le cadre d'une mutualisation, il n'est pas utile a priori de connaître tous les contributeurs, ceux-ci étant amenés à intervenir ponctuellement et parfois même de manière anonyme.
Le travail coopératif est un niveau supérieur d'intégration dans le travail en commun. En effet, la coopération nécessite une organisation interne minimaliste. Très souvent, cette organisation a pour but de définir préalablement une répartition des tâches permettant d'arriver à un résultat. De ce fait, il est plus difficile de mener un travail coopératif ouvert, dans la mesure où chaque nouvel intervenant doit pouvoir venir s'insérer dans cette organisation. Pour un manuel scolaire, la répartition des tâches peut se faire sur le fond (par exemple se répartir les chapitres ou les parties d'un chapitre) ou sur la forme (par exemple, un expert pour la mise en page, un autre pour l'insertion des images...) ou sur les deux en même temps. Le travail coopératif nécessite un minimum de liens et donc de communication entre les différents intervenants et souvent une structure (formelle ou informelle) pour gérer l'organisation. Dans le cadre de la réalisation d'un manuel scolaire, il y a presque nécessairement une phase de coopération, non seulement entre les auteurs, mais aussi avec d'autres partenaires (éditeur, graphiste, imprimeur...). On peut même dire qu'il y a souvent plusieurs travaux coopératifs en parallèle, avec la difficulté qui consiste alors à les coordonner efficacement.
Le travail collaboratif est l'une des formes les plus avancées de travail en commun. Il ne s'agit pas seulement de se répartir le travail comme pour le travail coopératif, mais bien d’interagir à plusieurs sur un même chantier. Par exemple, dans le cas d'un manuel libre, cela veut dire que plusieurs auteurs écrivent ensemble des exercices ou des leçons. Cela nécessite évidemment un haut niveau de communication et une méthodologie spéciale de travail. En effet, il n'est pas évident de travailler à plusieurs sur un même objet. En particulier, il faut pouvoir gérer les différences de rythmes, les désaccords éventuels et surtout il faut être capable de conserver une unité d'ensemble. Cette forme de travail est plus facile à mener sur des parties consensuelles ou largement codifiées. De manière plus générale, il est plus facile de travailler collaborativement avec des personnes dont on partage l'essentiel des valeurs : les compromis sur le fond sont en général plus faciles à trouver dans ce cas-là. Ceci dit, le travail collaboratif peut aussi se concevoir entre personnes aux avis divergents ; la richesse du processus qui en découle, sous réserve qu'il soit bien maîtrisé, peut en effet être très féconde d'un point de vue pédagogique. Dans tous les cas, pour déployer sereinement un travail collaboratif de qualité dans une équipe, il faut pouvoir établir des règles claires (en particulier pour gérer les conflits éventuels) et surtout, il faut bien avoir discuté préalablement de la ligne éditoriale du manuel afin de partir de constats et références partagées. L'expérience montre qu'il vaut mieux s'en tenir parfois à un travail coopératif de qualité plutôt que d'essayer trop tôt un travail collaboratif voué à l'échec, faute d'une préparation adéquate.
L'écriture en équipe d'un manuel scolaire est une entreprise complexe. Dans les faits, les différentes formes de travail sont parfois entremêlées, et il peut parfois être judicieux de préserver des espaces d'expérimentation.
En particulier :
Il n'existe malheureusement pas de formule parfaite permettant de déterminer la composition idéale pour une équipe d'auteurs. En effet, énormément de paramètres entrent en jeu, en particulier :
Idéalement, la conception d'un manuel pourrait commencer par un atelier permettant de répondre à la plupart de ces questions. En particulier (nous y reviendrons), il peut être utile de prévoir une période de mise à niveau ou de remise à nouveau (c'est rarement du temps perdu).
Voici quelques remarques générales permettant d'apprécier le nombre d'auteurs optimal pour de tels projets.
Il n'est pas toujours facile de déterminer un ou des profils d'auteurs. De manière générale, les auteurs de manuels scolaires sont des professeurs en exercice ou ayant exercé, ou bien des spécialistes de la discipline concernée (universitaires, formateurs, inspecteurs...). L'essentiel est d'avoir une expérience de l'enseignement dans la discipline et le niveau concernée, que cette expérience soit directe ou indirecte. Il est souvent intéressant d'avoir des profils différents dans une équipe : cela permet en effet de multiplier les points de vue et expériences. Mais pour que l'équipe fonctionne de manière optimale, il faut que chacun puisse dépasser ses propres opinions et accepter un débat constructif. Aussi, un critère fondamental est la capacité pour un auteur de travailler et s'insérer dans une équipe. S'il s'agit d'un enseignant, travaille-t-il ou a-t-il déjà travaillé en équipe avec ses collègues (pour préparer des leçons, des devoirs communs...) ?
Il peut arriver qu'il y ait des considérations d'ordre hiérarchique dans une équipe d'auteurs. Par exemple, un enseignant et la personne qui l'inspecte peuvent être amenés à travailler ensemble. Ce n'est pas forcément un souci, d'autant que l'équipe d'auteurs peut elle-même être hiérarchisée parfois.
Voici quelques qualités qui peuvent être utiles à un auteur de manuel scolaire :
On peut considérer le schéma ci-dessous qui illustre de manière très générale la conception de ressources pédagogiques autour de 3 pôles :
Un fonctionnement classique de ce réseau est le suivant : le scénariste envoie un scénario au développeur qui développe le produit. Puis ce produit est testé par un testeur qui renvoie ces préconisations au scénariste. Éventuellement, le scénario est alors modifié pour un renvoi au développeur, entamant ainsi une seconde itération du réseau. Il peut évidemment y avoir des mini-itérations plus courtes : par exemple, le développeur renvoie directement au scénariste des demandes de précision ou des validations de premiers jets... accentuant encore les délais d'une itération complète.
Ramené à l'exemple spécifique d'un manuel scolaire sous licence libre, ce schéma peut se traduire ainsi :
Traditionnellement, les auteurs s'occupent du pôle « écriture » tandis que l'éditeur s'occupe à la fois de la mise en page et de la relecture (en général via des personnes différentes). La montée en puissance des outils numériques (à la fois d'édition et de communication) a déjà modifié en partie le rôle de chacun dans la mesure où les éditeurs demandent de plus en plus des fichiers avec le contenu textuel non encore finalisé, ce qui accélère le travail de mise en page (par simples copier-coller).
Dans les 3 exemples d'édition présentés en préambule, ce processus est porté à l'extrême puisque les auteurs occupent en même temps les 3 pôles : dans ce cas, le rôle de l'éditeur est essentiellement un rôle d'imprimeur et de distributeur. Cela ne signifie pas que l'équipe d'auteurs soit en totale autarcie : en effet, elle peut ponctuellement avoir recours à un graphiste ou à des relecteurs extérieurs, mais elle concentre l'essentiel de l'action des 3 pôles. D'une certaine façon, chaque auteur est donc à la fois scénariste du contenu pédagogique, développeur du fichier final envoyé à l'éditeur et relecteur de ses autres collègues auteurs. Cette façon de procéder a des avantages et des inconvénients :
Avantages :
Inconvénients :
Une manière de lisser les inconvénients est d'introduire une spécialisation relative dans l'équipe d'auteurs : même si tous doivent savoir faire les actions de base dans les 3 pôles, certains auteurs, pour des raisons d'affinité et de compétences, peuvent se spécialiser plus spécifiquement dans la mise en page ou dans la relecture : on a observé ce phénomène dans les 3 exemples cités en préambule.
Une autre spécialisation est importante : il s'agit du rôle de coordinateur de l'équipe. Même si celui-ci gagne a être lui aussi un auteur à part entière (avec sans doute moins de contenu à produire), il est nécessaire d'avoir une position en surplomb afin :
Ce rôle est essentiel et souvent délicat à mener, car il nécessite à la fois de la fermeté et une certaine souplesse. Pour être pleinement opérant, il faut qu'il soit reconnu par tous les membres de l'équipe et clairement explicité en amont.
En dehors de ces spécialisations, les auteurs auront de toute façon à sa répartir le contenu du manuel. Si celui-ci est découpé en partie et chaque partie en sous-parties identifiées (leçons, exercices...), la répartition pourra se faire soit par chapitres entiers, soit par sous-parties (un auteur s'occupant par exemple de toutes les leçons) : ces 2 types de répartition ont leurs avantages et leurs inconvénients et peuvent parfois coexister.
Le travail en sous-équipe peut être intéressant (par exemple justifié par une proximité géographique des auteurs, ou toute autre raison) : par exemple, deux sous équipes peuvent travailler en parallèle (par exemple, chacune une partie du manuel, ou pour chaque partie l'une s'occupant de tel type de contenus...). L'intérêt de ce fonctionnement est qu'une équipe devient alors la relectrice des travaux de l'autre. Ces relectures croisées permettent par ailleurs de renforcer la cohésion d'ensemble, même si elle est de toute façon assurée par le travail du coordinateur.
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